September 13, 2024

Désistement dans l'affaire Invest Conseils relative à l'assimilation d'un limited partnership écossais à une société de libre partenariat de droit français excluant l'application du régime mère-fille (Conseil d'Etat, 21 août 2024, n° 490819)

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Le Conseil d'Etat a donné acte du désistement de la SAS Invest Conseils dans le cadre de l'affaire pour laquelle le Tribunal administratif de Paris et la Cour administrative d'appel de Paris ont considéré que la somme perçue par une société française soumise à l'impôt sur les sociétés en provenance d'un limited partnership écossais exerçant une activité de fonds d'investissement ne peut pas bénéficier du régime mère-fille, car ce limited partnership écossais doit être assimilé à une société de libre partenariat dont le régime fiscal est celui des articles 1655 sexies A et 137 bis du CGI.

1. Rappel des principes applicables

Selon la jurisprudence Artémis (Conseil d'Etat, 24 novembre 2014, n° 363556), il appartient au juge de l'impôt saisi d'un litige portant sur le traitement fiscal d'une opération impliquant une société de droit étranger d'identifier d'abord, au regard de l'ensemble des caractéristiques de cette société en cause et du droit qui en régit la constitution et le fonctionnement, le type de société de droit français auquel la société de droit étranger est assimilable. Compte tenu de ces constatations, il lui revient ensuite de déterminer le régime applicable à l'opération litigieuse au regard de la loi fiscale française. Cette décision indique que pour l'assimilation d'une société étrangère à une société française, seul le régime juridique de la société au regard du droit étranger doit être pris en compte, ce qui exclut le droit fiscal étranger.

2. Faits et procédure

La société de droit français SAS Invest Conseils exerce une activité de conseil en gestion, investissement et prise de participation dans toutes opérations financières. Par une réclamation, cette société a sollicité l’application du régime mère-fille au titre des sommes perçues de la part d’un limited partnership écossais, dont elle détenait 8,5% du capital. L’administration n’a pas répondu à cette réclamation et la société a alors exercé un recours pour bénéficier de l'application du régime mère-fille.

Les juges de première instance (TA Paris, 9 juin 2022, n° 2010825/2-3, Sté Invest Conseils), ont assimilé, en application de la jurisprudence Artémis, le partnership de droit écossais à une société en commandite simple, et plus précisément au sein de cette catégorie, au regard de l'activité de fonds d'investissement du partnership, à une société de libre partenariat dont les versements sont imposables entre les mains des porteurs de parts sur le fondement de l’article 137 bis du CGI et ne peuvent donc pas ouvrir droit au régime mère-fille.

La Cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 10 novembre 2023, n° 22PA03675) a elle aussi appliqué la jurisprudence Artémis pour confirmer l'assimilation du limited partnership de droit écossais à une société de libre partenariat et refusé l'application du régime mère-fille. La Cour a écarté le moyen tenant à ce que le partnership de droit écossais a été constitué antérieurement à la création en droit français de la catégorie juridique de la société de libre partenariat en considérant que ce moyen n'est pas de nature à faire obstacle à ce qu'il puisse être assimilé à une société de libre partenariat. La Cour a en outre écarté les différents moyens selon lesquels les statuts du fonds sont contraires à certaines dispositions du Code monétaire et financier, dès lors que ces dispositions sont facultatives. Ainsi, la Cour a estimé que les statuts du fonds peuvent exclure les associés commanditaires de la gestion de la société et ne pas comporter de règles précises d'investissement et d'engagement sans faire obstacle à l'assimilation du fonds à une société de libre partenariat. La Cour a également jugé que le partnership n'est pas soumis à la règle de détention d'un capital social d'au moins 300 000 € puisqu'il délègue la gestion de son portefeuille à une autre société.

Enfin, le moyen tenant à l'absence de soumission du fonds à une obligation émanant d'un « régulateur » écossais compétent et son absence de placement sous contrôle d'une institution écossaise équivalente à l'Autorité des marchés financiers alors que cela est exigé des sociétés de libre partenariat de droit français a été écarté par la Cour car n'étant pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. La Cour a ainsi considéré que la SAS Invest Conseils n'apportait pas d'éléments probants qui démontreraient que le fonds écossais ne doit pas être assimilé à une société de libre partenariat.

La SAS Invest Conseils s'est pourvue en cassation contre cet arrêt par un pourvoi du 10 janvier 2024 dont elle s'est toutefois désistée par un nouveau mémoire du 10 avril 2024.

3. Décision du Conseil d'Etat

Dans cette décision du 21 août 2024, le Conseil d'Etat a donné acte du désistement de la SAS Invest Conseils.

4. Portée

Par ce désistement, la position exprimée dans l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris devient définitive. Ainsi, en l’état actuel de la jurisprudence, un limited partnership écossais exerçant une activité de fonds professionnel spécialisé doit être assimilé à une société de libre partenariat et par conséquent, les versements provenant de ce limited partnership écossais à destination d'une société mère française ne peuvent pas bénéficier du régime mère-fille.

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